Partagora, Toutbox… l’ebook met-il le livre en danger ?

Le cinéma et la musique combattent déjà depuis longtemps le téléchargement illégal. Avec la croissance du marché de l’ebook, il semblerait que ce soit maintenant au monde du livre de mener ce combat. Avec la fermeture récente de sites comme Partagora et Toutbox, il vient de remporter une première victoire.

Partagora, Toutbox, des sites de partages illégaux

Partagora, Toutbox et bien d’autres sites encore, se sont spécialisés dans le partage de fichiers divers, que ce soit des films, des séries et, surtout, des livres numériques. Effectivement, avec l’apparition du livre numérique, aussi appelé ebook, le monde de l’édition a dû faire face à l’apparition du partage de fichiers piratés, comme la musique et le cinéma il y a 15 ans.

Évidemment, les maisons d’édition françaises ne sont pas restées immobiles face à cette nouvelle menace pesant sur leurs revenus. Elles se sont organisées et ont alerté les pouvoirs publics au sujet de l’existence de ces sites. Résultat, depuis quelques années, la police fait la chasse à ces sites illégaux et les ferme les uns après les autres.

Le site Toutbox (qui avait été rebaptisé Partageurs) a fermé en avril 2016 et le site Partagora en juin 2017. Évidemment, ces sites ne se prétendaient pas malintentionnés et voulaient seulement faciliter le partage de la culture et des connaissances. Effectivement, une option du site permettait de déclarer un fichier illégal pour qu’il soit retiré. Cependant, dans les faits, le retrait n’était pas automatique et presque tous les fichiers étaient illégalement partagés.

Auteurs, un métier précaire

Si le métier d’auteur fait rêver de nombreux Français, leur situation financière ne semble pourtant pas vraiment enviable. En France, il y a environ 100 mille auteurs, c’est-à-dire des personnes qui gagnent de l’argent grâce à une création littéraire, qu’elle touche au cinéma, au domaine scientifique ou au monde du livre. Sur ces 100 mille, un peu moins de 6 mille sont affiliés à l’Agessa.

Qu’est-ce que cela veut dire ? Pour que son affiliation à l’Agessa, la caisse de sécurité sociale des auteurs, soit validée, un auteur doit justifier d’au moins 8649€ de droits d’auteur dans l’année. Le revenu médian des affiliés, selon l’INSEE, est de 17 600€ (contre 21 264€ chez les salariés français). Pour les non affiliés, la moyenne des revenus est de 1 429€ par an.

Difficile donc de vivre de sa plume, aujourd’hui, en France. Alors, quand les auteurs s’annoncent soulagés de voir les sites qui partagent gratuitement et illégalement leur travail fermer, on en comprend facilement la raison. Pourtant, cette précarisation du statut d’auteur a commencé bien avant l’apparition de l’ebook et du téléchargement illégal, c’est-à-dire dès les années 90.

L’ebook et le téléchargement illégal sont-ils responsables de cette précarité ?

Lorsque l’on considère la création artistique ou intellectuelle et la précarité de certains des métiers qui la compose, on peut être rapidement être tenté de considérer le téléchargement illégal comme la source du problème. Effectivement, il ne faut pas longtemps de calcul mental pour comprendre qu’une œuvre que l’on se procure gratuitement représente des revenus en moins pour l’artiste.

Pourtant, la précarisation croissante du métier d’auteur a commencé dès les années 90, bien avant l’apparition et l’essor de l’ebook et de son piratage. De même, dans le milieu du cinéma et de la musique, l’apparition du téléchargement illégal a inquiéter de nombreuses personnes mais n’a finalement pas condamné ces deux industries.

Au contraire, aujourd’hui, le cinéma français ne s’est jamais aussi bien porté avec des taux de fréquentation dont on n’osait plus rêver dans les années 80, pareil pour la vente de CD et, surtout, de vinyle. De même, le marché du livre en France, après une courte crise, a connu une croissance de 1,8% sur l’année 2017. Alors, les auteurs doivent-ils vraiment craindre l’ebook, Partagora, Toutbox et compagnie ?

Un problème structurel ?

Comme dans le milieu des années 2010 pour le cinéma, le monde de l’édition est vivement critiqué pour son fonctionnement et l’organisation de la répartition des richesses. Souvenez-vous comme les salaires astronomiques de certains acteurs avaient été critiqués, au regard du pourcentage important qu’ils occupaient dans le budget des films.

Un peu de la même manière, certains auteurs, notamment ceux dont le premier livre a rencontré le succès, se plaignent des mauvais contrats qu’on leur impose. Effectivement, difficile quand on débute de négocier des droits d’auteur importants et ainsi s’assurer des revenus suffisants. En général, les auteurs débutants acceptent sans discuter, trop heureux d’être édités.

D’un autre côté, il serait totalement faux d’imaginer les maisons d’édition comme des exploitants de mines d’or sans scrupules. La plupart d’entre elles se plaignent, au contraire, des coûts d’exploitation importants de leur activité et considèrent les droits d’auteur comme une part majeure de ce coût. Effectivement, en France en 2014, les maisons d’éditions auraient versé 438 millions d’euros en droits d’auteur. Un chiffre important, mais ramené à 4,38€ par auteur si l’on considère les 100 000 auteurs français.

Quel avenir pour l’ebook et l’édition ?

Au milieu de toutes ces questions sur le marché du livre et ses revenus, une autre subsiste : l’édition sera-t-elle, un jour, obligée, comme l’ont été le cinéma et la musique, de se convertir aux abonnements illimités ? Effectivement, le marché de la musique et celui du cinéma doivent en grande partie leur relance aux nouvelles offres illimitées, de streaming, de VOD ou même de cartes de cinéma.

Puisque le téléchargement semble inévitable, que les tentatives de l’éliminer ne sont qu’à peine parvenues à l’endiguer, la solution repose alors sans doute dans le fait de pousser les consommateurs en s’en désintéresser. Pour cela, les abonnements donnant un accès illimité à du contenu semblent avoir rassasié l’appétit des consommateurs et les a éloigné du téléchargement illégal.

Il reste cependant à savoir si l’ebook est un modèle viable car, contrairement au MP3 ou au streaming, il n’a pas été le raz-de-marée que certain espéré. Au contraire, il semblerait que les lecteurs apprécient le format papier justement pour se reposer des écrans devant lesquels ils passent leur journée. Difficile de prévoir donc avec certitude l’avenir de l’édition, mais son combat contre le téléchargement illégal et les sites comme Partagora et Toutbox continue.

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